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Chapelle de La Bâtiaz, Martigny, Suisse

Chapelle de La Bâtiaz, Martigny, Suisse

  • 2014
  • 8, Chemin de la Chapelle, CH-1920 Martigny, Suisse

Téléphonez au 027/722.22.82, afin de connaître les horaires d’ouverture en dehors de la messe du mardi à 19 heures.

Très tôt, Martigny fit son entrée dans l’histoire grâce à Jules César qui vint livrer bataille en 57 avant Jésus-Christ dans une cité qui s’appelait alors Octodure. Les Romains y ont laissé de nombreux et importants témoignages de leur civilisation. Depuis un siècle environ, on a mis au jour et restauré l’amphithéâtre du Vivier, le temple de Mithra, la promenade archéologique du forum et un temple gallo-romain autour duquel a été construit, par la Fondation Pierre Gianadda, le musée archéologique Forum Claudii Vallensium.

Construit aux alentours du XIIIe siècle, le château de La Bâtiaz tire son nom de bastida (la forteresse) et remplaça la forteresse de la Crête, établie plus loin à Martigny-Bourg. Situé à un endroit stratégique, il permettait de contrôler l’important passage du Grand-Saint-Bernard qui assurait une partie des échanges entre le nord et le sud des Alpes. Blottie au pied du bloc abrupt que couronne le donjon du château, la chapelle a l’air bien plus humble. Elle est cependant connue pour abriter l’une des plus belles collections d’ex-voto du Valais, les plus anciens datant de 1714. La première chapelle de La Bâtiaz aurait été élevée entre 1625 et 1630 par le prêtre martignerain Claude Semblanet à la place d’un modeste oratoire édifié par Antoine Pecquoz après l’inondation de 1595.

Véritablement calée entre le rocher et la route qui longe le cours de la Dranse au sud, la chapelle Notre-Dame-de-Compassion n’a pas subi de retouches majeures depuis sa reconstruction vers 1738. Très simple, le plan présente une nef unique de deux travées et un chœur plus étroit d’une travée au chevet de plan polygonal à trois pans. Extérieurement, la masse des volumes successifs n’est guère articulée que par les chaînes d’angle harpées de la nef, peintes en trompe-l’œil. Les fenêtres pourvues de grilles sont rectangulaires, sans mouluration. Sur la façade principale, le portail est en arc en plein cintre, soutenu par des impostes et pourvu d’une simple clef. Entouré de deux petites fenêtres basses, il est surmonté par une niche simple au fond bleu azur, où l’on a installé une Vierge de Lourdes protégée par une grille. Plus haut et encore dans l’axe, un oculus complète les percements destinés à éclairer l’intérieur.

L’ensemble demeure sobre, presque austère, pour un bâtiment datant d’une époque où l’exubérance régnait dans les arts. L’intérieur se rapproche de l’idéal et des pratiques du milieu du XVIIIe siècle, même si l’on émet l’hypothèse que parois et voûtes aient pu être revêtues d’un décor peint, éliminé depuis lors. L’autel et son retable, pièce principale du mobilier, offre l’un des rares témoignages conservés dans le Valais romand de cette apothéose du baroque que fut le rococo. Aujourd’hui réduits au nombre de soixante-quatre et fixés sur deux panneaux à la paroi septentrionale de la nef, les ex-voto n’épargnaient naguère qu’une faible partie des murs de Notre-Dame-de-Compassion. Mis à l’honneur il y a une trentaine d’années, à l’occasion d’expositions tenues à Martigny et à Zurich, ils ont alors dépassé la notoriété locale. Leurs sujets évoquent les accidents auxquels les donateurs reconnaissants ont échappé ainsi que des guérisons aussi heureuses qu’inespérées, thèmes qui caractérisent le genre aux époques concernées.

La fréquentation des lieux demeure, aujourd’hui encore, intense et permanente. L’église de La Bâtiaz est un lieu de pèlerinage local, régional et même diocésain. Antérieure à la création de vitraux pour l’église de La Bâtiaz, l’aventure des vitraux du temple protestant de Martigny n’a pas été sans influence sur cet autre lieu de culte, catholique cette fois, de Martigny. Une phrase du conseiller communal David Martinetti à Léonard Gianadda avait fait le tour de la cité : « Vous avez fait un beau cadeau aux protestants… Pourquoi pas aux catholiques ? » La question fut à l’origine du projet qui va, dans un étonnant parallélisme, modifier la décoration de la chapelle de La Bâtiaz.

Léonard Gianadda a en effet rencontré, en 2012, le père dominicain Kim En Joong. Des liens se sont tissés car ils partagent des amitiés fortes. Un instant, le mécène envisage de lui confier l’exécution des cinq vitraux situés à l’arrière du temple protestant. Puis, dans un paradoxe comme il les aime, il trouve intéressant qu’aux vitraux figuratifs du temple protestant répondent des vitraux abstraits dans la chapelle catholique. L’idée fait son chemin de remplacer les sept vitrages, placés en 1975, par une réalisation originale conçue pour ce lieu.

Le père Kim se rend sur place, rencontre le mécène et le curé de la paroisse, François Lamon. Il est enthousiaste et communique sa foi à ses partenaires. Sur la base d’un programme intuitif, il réalise ses verres peints dans l’atelier Loire de Chartres. « Notre-Dame-de-Compassion, abritée contre le rocher, est pour moi un rempart. Si la façade de cette chapelle comporte trois fenêtres, à l’intérieur, quatre ouvertures font face à une mosaïque d’innombrables « remerciements ». Pour participer à la « Compassion de la Très Sainte Vierge Marie », j’ai utilisé la technique du thermoformage ; les lignes de ce support particulier du vitrail donnent ainsi l’image du Buisson Ardent. Sur ce fond, les couleurs s’élèvent telle une flamme ; en dessous de la rosace, les six verrières rectangulaires sont un hommage à la Sainte Trinité qui nous a offert la Sainte Vierge Miséricordieuse. Les six couleurs qui ornent les vitraux citent le vêtement du Christ au moment de la Passion et la joie intérieure de sa mère co-rédemptrice : le violet, comme symbole de royauté, de divinité et de pénitence, le rouge pour la Passion et l’Esprit Saint, le bleu, reflet de la pureté et de l’humanité, le vert comme évocation de la paix et de la croissance, le jaune, image de la joie et de la lumière ressuscitée, et le noir pour à la fois la sobriété, le silence et les ténèbres. Pour le visiteur, mes vitraux ne sont donc pas un simple jeu de couleurs, mais un regard rayonnant vers la lumière ; j’ai fait en sorte que mon travail soit un don de source divine, à la manière de la Sainte Vierge, la mère de Celui qui est ressuscité pour le salut de l’humanité. » Il vient à plusieurs reprises à Martigny, et transporte, en train, les premières œuvres achevées. Un huitième vitrail est offert à Léonard Gianadda.

Une fois levés les multiples obstacles liés à une intervention dans un monument historique classé depuis 1973, les nouveaux vitraux de la chapelle de Notre-Dame-de-Compassion sont installés en octobre 2013. La pose est effectuée par Charles Righini qui avait déjà réalisé, comme travail de fin d’apprentissage en 1975, la serrurerie des anciennes verrières. À travers les formes abstraites et colorées des vitraux du père Kim, la lumière pénètre différemment dans la chapelle, crée une nouvelle atmosphère autour de l’exceptionnelle collection d’ex-voto.

Le lundi 15 septembre 2014 eut lieu dans la chapelle de La Bâtiaz, à Martigny en Suisse, l’inauguration des 7 vitraux réalisés par le Père Kim En Joong, ceci grâce à l’initiative de Leonard Gianadda et de la Fondation Pierre Gianadda.

Les vitraux ont été créés par les Ateliers Loire.